La cohérence cardiaque est née au Etats-Unis dans les années 90 ; elle a été portée à la connaissance du public français par le Dr David Servan-Schreiber en 2003 lors de la publication de son livre « Guérir » et par le médecin francophone David O’Hare qui a signé plusieurs ouvrages sur le sujet.
Je vous propose aujourd’hui de mettre le focus sur cette pratique très accessible dont les bénéfices sont nombreux et susceptibles d’améliorer sensiblement votre quotidien.
L’état de cohérence cardiaque
Avant de parler de la pratique respiratoire à laquelle la cohérence cardiaque est aujourd’hui assimilée, j’aimerais porter l’attention sur les caractéristiques de l’état de cohérence.
L’état de cohérence cardiaque est au centre des recherches de l’Institut HeartMath, fondé en 1991 aux Etats-Unis, qui regroupe des chercheurs qui s’intéressent à la dimension du cœur dans une compréhension globale incluant les mécanismes physiologiques, psychologiques et la relation cœur-cerveau.
Cet état de cohérence cardiaque, ou cohérence psycho-physiologique, correspond à un état de parfaite synchronisation du système nerveux autonome que l’on peut objectiver par l’observation des battements du cœur. Il coïncide avec un état de fonctionnement optimal tant au niveau physiologique que psychologique (sphère émotionnelle et mentale) : capacités cérébrales aiguisées (qualité d’attention, clarté mentale), qualité de présence élevée et, plus largement, une capacité d’adaptation optimale qui permet de traverser toute circonstance avec une fluidité exceptionnelle : action et réaction pertinentes, ajustées, perceptions claires des opportunités et ressources disponibles, disponibilité et harmonie à tous les plans de l’être.
Au niveau spécifiquement du muscle cardiaque, l’état de cohérence est illustré par une courbe harmonieuse de la variabilité de la fréquence cardiaque. De quoi s’agit-il ?
Le cœur bat un certain nombre de fois par minute ; c’est ce que l’on appelle la fréquence cardiaque. Ce rythme cardiaque nous apparaît régulier. En réalité, il existe d’infimes variations qui font que certains battements du cœur sont plus rapprochés et d’autres plus espacés, ces variations étant directement en lien avec la respiration. A l’inspiration, alors que le système nerveux autonome est en mode sympathique (fonction physiologique qui permet l’action), le cœur accélère légèrement ; et à l’expiration, le système nerveux autonome passant en mode parasympathique (fonction associée à la régénération au sens large), le cœur ralenti légèrement. C’est cela que l’on appelle la variabilité de la fréquence cardiaque, cette capacité du cœur à adapter sa fréquence en fonction de l’état du système nerveux, lui-même répondant aux circonstances internes ou externes et aux variations de notre état émotionnel.
La variabilité de la fréquence cardiaque
Plus la variabilité de la fréquence cardiaque est grande, plus la capacité adaptative est importante et donc meilleure est la capacité à faire face aux différents stress et déstabilisations rencontrées. Cette variabilité cardiaque constitue donc un marqueur de notre résilience physiologique et de notre flexibilité comportementale. C’est également un marqueur de l’âge biologique, la variabilité de la fréquence cardiaque étant optimale dans la jeunesse. Une faible variabilité cardiaque comparativement à une tranche d’âge donnée est également corrélée à un plus grand risque pathologique et une mortalité précoce.
La représentation de cette variabilité de la fréquence cardiaque est donc le témoin de notre capacité à traverser avec plus ou moins d’aisance les circonstances de la vie.
Il existe plusieurs pratiques visant à moduler la variabilité de la fréquence cardiaque, incluant la focalisation sur le cœur, la perception de sensations ou d’émotions agréables et la pratique respiratoire. C’est sur cette dernière que nous allons maintenant poser notre attention.
La pratique respiratoire
La pratique de la respiration simple et régulière décrite ici permet d’harmoniser la courbe de la variabilité de la fréquence cardiaque en induisant une synchronisation des branches sympathique et parasympathique du système nerveux autonome.
365 - la base de la pratique : 6 respirations par minutes, pendant 5 minutes, 3 fois par jour.
Concrètement, il s’agit simplement de respirer de manière continue, sans pause ou apnée, et régulièrement : 5 secondes pour l’inspiration et 5 secondes pour l’expiration était le rythme proposé au début des études relatives à la cohérence cardiaque, soit un cycle respiratoire sur 10 secondes et 6 cycles par minutes. Aujourd’hui, il s’avère que le rythme respiratoire le plus propice à harmoniser la courbe de variabilité de la fréquence cardiaque est en fait de 11 secondes pour un cycle, soit 5,5 secondes par inspiration et 5,5 secondes par expiration.
D’un point de vue pratique, vous pouvez utiliser un métronome calibré à 55 battements par minutes et inspirer sur 5 battements puis expirer sur 5 battements. Il existe aussi plusieurs applications qui vous permettent de respirer « en rythme » sans avoir besoin de compter vos temps d’inspire et d’expire, à la faveur d’une image (une bille oscillant entre haut et bas : vous inspirez quand la bille monte et vous expirez quand elle descend) ou d’un son (un gong pour l’inspiration et un autre pour l’expiration).
La durée de la pratique - 5 minutes - est une moyenne de la durée qui permet l’harmonisation durable du système nerveux autonome et des fonctions associées. Cette courte pratique a des effets qui peuvent se prolonger 3 à 6 heures, d’où l’invitation à pratiquer 3 fois par jour : au réveil, au moment du déjeuner et en milieu d’après-midi pour établir un état de cohérence cardiaque du matin au soir. Rien ne vous empêche, bien sûr, de pratiquer au coucher également et d’inclure les bénéfices de la pratique au service de la qualité de votre sommeil.
Les bénéfices de la pratique
La synchronisation du système nerveux autonome induite par la pratique de la cohérence cardiaque va se répercuter sur toutes les fonctions physiologiques autonomes (outre la fonction cardiaque, les fonctions respiratoire, digestive, d’équilibre et de réparation cellulaire etc.).
Au niveau des marqueurs biologiques, on peut observer :
- La diminution du taux de cortisol, hormone liée à la réponse aux situations de stress
- L’augmentation de certains anticorps (immunoglobulines A), soit un renforcement du système immunitaire
- L’augmentation de certains facteurs qui normalisent la tension artérielle
- L’augmentation du taux de DHEA, dite hormone de jouvence
- L’augmentation de la sécrétion de certains neuromédiateurs associés au bien-être (sérotonine, dopamine)
- L’augmentation de la sécrétion d’ocytocine, l’hormone dite de l’amour.
Il résulte de la pratique une meilleure capacité à faire face aux situations de stress, avec une sensation immédiate d’apaisement et de calme et des ressources adaptatives plus disponibles.
La pratique régulière de la cohérence cardiaque montre aussi des effets à long terme tels que :
- La régulation de l’hypertension artérielle
- La prévention du risque cardiovasculaire
- La normalisation des processus inflammatoires et une meilleure tolérance à la douleur
- Une amélioration des troubles de l’anxiété et de la dépression
- Un sommeil plus qualitatif
- La régulation des émotions
- Une régulation de la relation émotionnelle à l’alimentation avec normalisation du poids corporel à la clé
- Une plus grande clarté mentale, l’amélioration des capacités d’apprentissage et de la prise de décision,
tous ces éléments étant corrélés à une amélioration de la qualité et de l’espérance de vie.
Régulation de la fréquence et de la variabilité cardiaque
par la pratique respiratoire
Le cœur en relation avec le cerveau et l’ensemble du corps
Savez-vous que le cœur possède son propre réseau de neurones ? Ces neurones interagissent avec le réseau neuronal du cerveau à chaque instant et la communication se fait à double sens ! Et aussi, ce système nerveux cardiaque permet au cœur de percevoir et traiter de l’information, prendre des décisions et même développer une forme d’apprentissage et de mémoire, indépendamment du cerveau.
Le cœur fonctionne aussi comme une glande neuro-endocrine, sécrétant des hormones et neuromédiateurs qui vont influencer la totalité de l’organisme. Par exemple, le cœur sécrète de l’ocytocine, l’hormone « de l’amour » citée plus haut.
On sait depuis longtemps que, lorsque vous êtes confronté à un stimulus, le téléphone qui sonne par exemple, votre système nerveux autonome, depuis le cerveau, entraine un ensemble d’adaptations physiologiques comprenant par exemple l’accélération du cœur. Au contraire, lorsque vous pratiquez un exercice de méditation, ce même système nerveux autonome va induire le ralentissement de la fréquence cardiaque.
En réalité, l’information circule aussi dans l’autre sens et même davantage ! Les informations envoyées par le cœur vers le cerveau ont des effets sur la régulation des émotions et les capacités cognitives : attention, perceptions, mémoire, capacité à résoudre des problèmes. Quand nous sommes en état de stress, la variabilité de la fréquence cardiaque figurant une courbe erratique, les influx nerveux partant du cœur vers le cerveau inhibent les fonctions cognitives avancées, et nous expérimentons de la confusion mentale, des troubles de la mémoire ou de l’apprentissage et la difficulté à prendre des décisions pertinentes. Et inversement, en état de cohérence cardiaque, la stabilité émotionnelle et les capacités cognitives sont facilitées.
Les recherches ont montré que ce sont les émotions et sentiments qui ont la plus grande influence sur le rythme cardiaque. Ainsi, lorsque vous éprouvez de la peur, de la colère, de la frustration, de l’anxiété par exemple, le schéma de variabilité cardiaque est irrégulier et erratique et cela influence votre système nerveux autonome et toute votre physiologie. Au contraire, lorsque vous éprouvez de la satisfaction, de la joie, de la gratitude, de l’amour etc., votre courbe de variabilité de la fréquence cardiaque se présente sous la forme d’une sinusoïde harmonieuse, exprimant l’état de cohérence cardiaque, et contribuant à un état général optimal.
Le cœur et l’intuition
Les recherches menées à l’Institut HeartMath se sont portées sur les phénomènes intuitifs qui sont passés peu à peu du statut de phénomène parapsychologique à objet d’investigation « sérieuses ».
Considérons l’intuition comme la possibilité d’accéder à une information de manière directe et immédiate. C’est ce qui se produit par exemple lorsque vous vous approchez du combiné téléphonique en pendant à quelqu’un et que justement cette personne vous appelle à ce moment précis, en considérant que cela n’a rien à voir avec le hasard. Cette hypothèse présuppose la capacité d’acquérir de l’information à distance, indépendamment de l’espace et du temps.
Les expériences menées sur les phénomènes de précognition témoignent de capacités perceptives réelles qui vont bien au-delà de celle que nous nous reconnaissons habituellement. Ainsi, lorsque des sujets sont placés devant un écran noir sur lequel sont projetées de manière aléatoire des images à caractère émotionnel (effrayantes ou paisibles par exemple), l’activation physiologique mesurée se déclenche en moyenne 5 secondes avant que l’image ne soit visible. Le corps réagit donc au stimulus avant que celui-ci ne soit perçu et c’est le système nerveux cardiaque qui, ayant reçu l’information, la traite et y répond avant le cerveau.
Et la mise en place d’un état de cohérence cardiaque est véritablement propice à améliorer ces capacités perceptives étonnantes : des études ayant analysé les schémas d’activité cardiaque en situation de jeux de hasard, typiques de situations de succès ou d’échec, ont montré une réaction physiologique présente avec 12 à 14 secondes d’anticipation chez des personnes ayant plus de dix ans de pratique de la cohérence cardiaque contre 4 à 7 secondes chez des sujets lambda.
Ces participants expérimentés ont d’ailleurs témoigné de leur capacité d’accéder à une forme de guidance intérieure, non cognitive, en lien avec une conscience de soi approfondie.
L’harmonisation interpersonnelle
Imaginez que vous pratiquiez la cohérence cardiaque et que votre compagne ou votre compagnon, à côté de vous, en ressente les effets : elle-il dort mieux, ses émotions sont plus harmonieuses, ses idées plus claires…
Certainement avez-vous déjà fait une expérience similaire avec les enfants dont les réactions répondent de manière assez cohérente à votre état neuropsychique personnel, quoique vous laissiez paraître.
La science commence tout juste à comprendre les effets des champs électromagnétiques cardiaques. Il apparaît aujourd’hui clairement que les informations contenues dans le puissant champ électromagnétique du coeur jouent un rôle majeur dans la synchronisation de l’organisme au niveau individuel et qu’elles peuvent affecter les autres autour de nous.
L’étude de l’interconnexion entre tous les systèmes vivants et avec le champ magnétique terrestre est un autre domaine de la recherche développé par l’Institut HeartMath. Elle a donné les premiers résultats concernant l’effet significatif de l’activité solaire et géomagnétique sur le fonctionnement mental et l’état émotionnel d’un groupe de 1600 volontaires. A l’étude également, l’activité électrique du sol et des arbres, et la manière dont ces derniers « réagissent » aux émotions humaines.
Dans toutes les traditions, le cœur est un centre spirituel de premier ordre, avec une fonction sacrée qui va bien au-delà de l’aspect simplement physiologique de pompe cardiaque. Les travaux amorcés pour l’étude de la cohérence cardiaque donnent à penser que cette voie du cœur, source d’harmonie et de transcendance, n’est peut-être pas que symbolique.
Données et schémas issus des travaux du HeartMath LLC: www.heartmath.com
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